Conférence Université du Temps Libre (novembre 2015)
L’évangile gnostique de Judas
Ecrit en copte, (Manuscrits de la Mer Morte – IIème s), cet Évangile privilégie la gnose et présente Jésus comme un révélateur de sagesse et de connaissance qui enseigne les mystères de l’Univers.
Judas est l’apôtre trésorier du groupe Jésus. Les Évangiles canoniques font de lui un traître, celui qui vends Jésus pour trente pièces d’argent. Sa fin est ignominieuse car, après avoir commis sa vile action, pris de remords, il se suicide en allant se pendre. Fin encore plus abjecte dans les Actes : son ventre se déchire et il meurt dans d’atroces souffrances !
Le JUDAS des Évangile canoniques
Dans les Évangiles canoniques, Judas est clairement désigné comme étant un traître : selon Matthieu : « Or le traître leur avait donné ce signe « Celui que je baiserai, c’est lui; arrêtez-le. »; le texte de Marc est rigoureusement identique; Luc, écrit simplement, le nommé Judas, et Jean : « Judas le traître connaissait bien l’endroit ».
L’annonce par Jésus de la trahison de Judas est sans équivoque : « En vérité je vous le dis, l’un de vous me livrera » Judas demanda , Serait-ce moi Rabbi ? Tu l’as dit répond Jésus. » Curieusement, malgré la désignation formelle du traître, aucun des onze ne s’insurge ni ne tente d’empêcher Judas de nuire. Lors de l’arrestation, Judas, par le signal convenu du baiser, dénonce Jésus. Il est étonnant qu’ aucun de ceux qui vinrent l’arrêter ne connaissait son aspect physique alors que lors de son entrée dans Jérusalem, le peuple le reconnait et l’acclame.
JUDAS l’Iscariote
Cet Évangile, dit de Judas, récemment mis à la disposition du public grâce à la traduction de Rodolphe Kasser, Marvin Meyer et Gregor Wurst, fut composé vers le milieu du IIème siècle. Dans cette version apocryphe, le rôle de Judas est très différent des récits des canoniques.
L’Évangile débute par cette phrase : « le compte rendu secret de la révélation faite par Jésus en dialoguant avec Judas l’Iscariote sur une durée de huit jours, trois jours avant qu’il célèbre la Pâque »
D’une haute tenue spirituelle il montre un Jésus humain : c’est le seul texte où il sourit plusieurs fois en constatant la difficulté que rencontrent ses disciples pour comprendre ses révélations sur les mystères de l’Univers et pour se débarrasser de leur croyance dans le Dieu antique de la Thora qu’ils s’entêtent à vénérer en pratiquant des rituels désuets. Seul, Judas a compris que Jésus est un homme nouveau qui révèle l’existence d’un autre monde. Il fait référence à la cosmogonie gnostique en disant « Je sais qui tu es et d’où tu es venu. Tu es issu du royaume immortel de Barbèlô ». Jésus a donc en lui une étincelle de la lumière-esprit de cet autre monde.
Commentant une vision de ses disciples, il dénonce leur comportement animal et leur erreur, car le Dieu qu’ils adorent n’est assurément pas celui qu’il s’évertue à leur révéler, certainement pas celui des sacrifices…
La Résurrection de JUDAS
Judas, à son tour décrit sa propre vision. Jésus sourit à nouveau, lui décrit l’Univers réel et lui déclare « Tu deviendras le treizième, et tu seras maudit par les autres générations et tu régneras sur elles. Lorsque viendront les derniers jours.. tu iras vers le haut ».
Autrement dit, malgré son destin tragique sur Terre, c’est lui qui, ayant acquis le plus haut degré de conscience, aura accès à l’autre monde. Et il ajoute : « Mais toi, tu les surpasseras tous, car tu sacrifieras l’homme qui me sert d’enveloppe charnelle ! » . Grâce à Judas, Jésus, enfin libéré de son enveloppe charnelle rejoindra l’autre monde. Judas a compris, dans l’enseignement de Jésus, que la résurrection précède la mort matérielle, alors, et cela pour tous les hommes, la transmutation spirituelle pourra s’opérer vers l’autre monde.
Il y a une constante entre la métaphysique de l’Évangile de Judas et celle de l’Évangile de Marie. En effet lorsqu’elle dit : « Je suis sortie du monde grâce à un autre monde; une représentation s’est effacée grâce à une représentation plus haute. Désormais je vais vers le Repos où le temps se repose dans l’Éternité du temps. Je vais vers le Silence. », il s’agit bien de ce monde de l’au-delà, le monde implicite bohmien, non matériel, sans espace et sans temps, celui du silence et du repos, ce monde créateur du monde explicite matériel où nous vivons, l’alpha et l’oméga, la Mémoire totale de l’Univers holistique.
Le JUDAS de l’Évangile de BARNABE
L’évangile apocryphe de Joseph dit Barnabé fut écrit probablement au IIème siècle. Barnabé ne fut pas un disciple de Jésus, mais il fut celui de Paul de Tarse.
Maintes fois copié et remanié il réapparut au XVIème siècle en version grecque, dans la bibliothèque du pape Sixte V. Redécouvert par J.F. Cramer, conseiller du roi de Prusse en 1713, il figure parmi les ouvrages de la bibliothèque impériale de Vienne en 1738.
Son intérêt réside en la prédiction de l’avènement du prophète de l’Islam, mais aussi dans l’affirmation que Jésus ne fut pas crucifié, car un Dieu ne peut pas s’incarner, ni a fortiori mourir supplicié, il fut donc remplacé sur la croix par Judas qui subit une transfiguration : « Judas devint si semblable à Jésus par son langage et dans son visage que nous crûmes que c’était Jésus. »
Jésus, le prophète, n’est venu sur la Terre que pour annoncer la venue de Mahomet : « Quant à moi, je suis venu dans ce monde pour préparer la voie au Messager de Dieu qui portera le salut du monde ».
Le dogme de la Trinité engendra une violente polémique parmi les chrétiens, ce fut l’Hérésie trinitaire. Le monothéisme fut défendu par les Ariens et Mahomet qui accusèrent les catholiques d’être tri-théistes. Ce conflit entraîna une conversion massive des Ariens à l’Islam.
Où est la vérité historique ?
Judas fut-il ce misérable traître sycophante qui vendit son maître pour trente pièces d’argent ? ou l’ami fidèle, le seul qui le comprit et qui accepta d’endosser, à la demande de celui-ci, la damnatio memoriae afin de lui permettre de réaliser sa résurrection ?